25 avril 2024
Cour d'appel de Versailles
RG n° 23/07012

Chambre civile 1-6

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78F



Chambre civile 1-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 23/07012 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WEBN



AFFAIRE :



[S] [T]



C/



[R] [N]



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juin 2023 par le Juge de l'exécution de VERSAILLES

N° RG : 22/05956



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 25.04.2024

à :



Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Fabienne FOURNIER LA TOURAILLE de la SELARL CABINET FOURNIER LA TOURAILLE, avocat au barreau de VERSAILLES



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :





Madame [S] [T]

née le [Date naissance 5] 1972 à [Localité 2] (21)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 7]



Représentant : Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 590 - N° du dossier E0002WQ6



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 786462023008000 du 25/01/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)



APPELANTE



****************



Monsieur [R] [N]

né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 2] (21)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 2]



Représentant : Me Fabienne FOURNIER LA TOURAILLE de la SELARL CABINET FOURNIER LA TOURAILLE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 80 - N° du dossier 15.530 - Représentant : Me Marine-Laure COSTA-RAMOS de la SELAS LEGI CONSEILS BOURGOGNE, Plaidant, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 117



INTIMÉ

****************



Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller et Madame Florence MICHON, Conseiller chargé du rapport.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,



Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,










EXPOSÉ DU LITIGE



Par jugement contradictoire rendu le 2 juillet 2021, signifié le 16 juillet 2021, le tribunal paritaire des baux ruraux de Dijon, statuant dans le cadre d'un litige opposant Mme [S] [T] et M. [O] [T], d'une part, et M. [R] [N], d'autre part, au sujet d'une partie d'une parcelle de terre située à [Localité 2] (21), cadastrée ZT[Cadastre 4], donnée à bail à M. [N] par Mme [B] [W], dont Mme [T] et M. [T] sont les héritiers, a, notamment, avec exécution provisoire :


débouté Mme [T] de sa demande visant à voir prononcer la résiliation du bail rural consenti à M. [N],

fixé la valeur vénale de la parcelle ZT[Cadastre 4] à 3 254 euros,

débouté M. [T] de sa demande visant à voir fixer la valeur vénale de la dite parcelle à la somme de 5 401,76 euros,

dit que si les consorts [T] n'acceptent pas la décision du tribunal ils pourront renoncer à la vente conformément aux dispositions de l'article L.412-7 alinéa 2 du code rural,

dit que dans le cas où la vente n'aura pas lieu, les frais d'expertise seront à la charge de la partie qui refuse la décision du tribunal,

dit que si la vente est réalisée selon la valeur fixée par la juridiction, les frais d'expertise d'un montant de 1 481,54 euros et avancés par M. [N] seront partagés par moitié entre les parties, - condamné Mme [T] et M. [T] à payer à M. [N] la somme de 6 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Mme [T] et M. [T] aux entiers dépens de la procédure, lesquels n'incluent pas le coût du procès-verbal de constat d'huissier du 4 août 2019, laissé à la charge de M. [N].




Agissant en vertu du jugement susvisé, M. [N] a fait procéder à l'encontre de Mme [T],


le 24 février 2022, à une saisie-attribution entre les mains du CIC Ile de France, pour avoir paiement d'une somme de 9 146,76 euros en principal et frais, mesure infructueuse dénoncée le 3 mars 2022,

le 22 mars 2022, à une saisie attribution entre les mains du CIC Ile de France, pour avoir paiement d'une somme de 5 296,61 euros en principal et frais, mesure fructueuse à hauteur de 157,30 euros, dénoncée le 24 mars 2022.




Par acte du 19 octobre 2022, Mme [T] a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles.



Par jugement contradictoire rendu le 2 juin 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles a :


déclaré recevable en la forme la contestation de Mme [T] à l'égard des saisies-attributions diligentées par M. [N] contre Mme [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022,

rejeté la demande de nullité des saisies-attributions diligentées par M. [N] contre Mme [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022,

cantonné les saisies-attributions diligentées par M. [N] contre Mme [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022 à la somme de 846,28 euros et dit qu'elle ne produira effet qu'à concurrence de cette somme,

ordonné la mainlevée partielle immédiate pour le surplus,

débouté Mme [T] de sa demande de condamnation de M. [N] à des dommages et intérêts,

débouté M. [N] de sa demande de condamnation de Mme [T] à des dommages et intérêts,




débouté Mme [T] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,


condamné Mme [T] à payer à M. [N] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté toute autre demande plus ample ou contraire des parties,





condamné Mme [T] aux entiers dépens,

rappelé que la décision est exécutoire de droit.




Le 13 octobre 2023, après avoir sollicité, et obtenu, l'aide juridictionnelle, Mme [T] a relevé appel de cette décision.



La clôture de l'instruction a été ordonnée le 5 mars 2024, avec fixation de la date des plaidoiries au 13 mars suivant.



Aux termes de ses premières et dernières conclusions remises au greffe le 30 novembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, Mme [T], appelante, demande à la cour de :


infirmer le jugement contradictoire et en premier ressort rendu le 2 juin 2023 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles (RG 22/05956) en ce qu'il a : rejeté la demande de nullité des saisies-attributions diligentées par M. [N] contre Mme [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022 // cantonné les saisies-attributions diligentées par M. [N] contre M. [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022 à la somme de 846,28 euros et dit qu'elle ne produira effet qu'à concurrence de cette somme // débouté Mme [T] de sa demande de condamnation de M. [N] à des dommages et intérêts // débouté Mme [T] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile // condamné Mme [T] à payer à M. [N] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile // rejeté les demandes plus amples ou contraires de Mme [T] // condamné Mme [T] aux entiers dépens,

Statuant à nouveau sur ces points :


A titre principal :


annuler les saisies-attributions litigieuses comme nulles et de nul effet, et ordonner leur mainlevée,


A titre subsidiaire :


faire sommation à M. [N] de justifier des sommes déjà perçues par M. [T] (sic),

ordonner la mainlevée des saisies-attributions litigieuses, la dette ayant été soldée par M. [T],

ordonner la restitution à Mme [T] de l'ensemble des sommes indûment saisies,

subsidiairement, cantonner les saisies-attributions aux montants qui resteraient effectivement dus et écarter les frais injustifiés,


En tout état de cause :


débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes,

condamner M. [N] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre du préjudice moral subi,

condamner M. [N] à payer à Maître Tarlet, membre de la SELARLU Cabinet Tarlet la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 2° du code de procédure civile,

condamner M. [N] aux entiers dépens.




Au soutien de ses demandes, Mme [T] fait valoir, en substance :


qu'alors qu'il revient au créancier de prouver qu'il dispose d'un titre et d'une créance liquide, certaine et exigible, M. [N], qui ne saurait recevoir deux fois le paiement de la même créance, ne justifie pas, par la production d'un relevé des paiements reçus, d'un solde qui lui resterait dû après imputation des règlements effectués par M. [T] ; que compte tenu de ces versements, la dette est désormais soldée, ce qui rend inutiles les saisies-attribution litigieuses ;

que l'huissier instrumentaire multiplie les actes à son encontre, alors qu'elle l'a informé le 22 octobre 2021 de sa déclaration d'appel adressée au greffe de la cour d'appel de Dijon devant le Premier président de la cour d'appel de Dijon afin d'arrêter l'exécution provisoire du jugement du 2 juillet 2021 (sic),

que l'intention de nuire est caractérisée par le fait qu'à ce jour le montant du fermage de la parcelle n'a pas été saisi sur le compte bancaire de M. [N] et Maître [H] [P] son huissier de justice ;

que les montants réclamés par l'huissier sont faux ; que celui-ci n'a pas déduit 7,18 euros retenus le 21 octobre 2021 ; qu'il n'a pas non plus déduit l'intégralité des versements effectués par M. [T], qui s'élèvent, arrêtés au mois d'avril 2023, à une somme totale de 8 700 euros ;





qu'en raison du harcèlement dont elle fait l'objet de la part de l'huissier mandaté par M. [N], elle subit une multiplication de frais bancaires et de frais d'huissier, qui sont exorbitants ; ainsi qu'une atteinte à sa tranquillité et à son honneur, qui lui causent un préjudice moral d'une extrême gravité;

que M. [N] a abusé de son droit d'ester en justice et s'est rendu coupable d'escroquerie au jugement du tribunal paritaire des baux ruraux ; qu'elle a d'ailleurs déposé plainte en ce sens, entre les mains des procureurs de la République de Versailles et de Dijon.




Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 6 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [N], intimé, demande à la cour de :


confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : cantonné les saisies-attributions diligentées par M. [N] contre Mme [T] selon procès-verbaux de saisie du 24 février 2022 et du 22 mars 2022, respectivement dénoncés les 3 mars 2022 et 24 mars 2022 à la somme de 846,28 euros et dit qu'elle ne produira effet qu'à concurrence de cette somme // ordonné la mainlevée partielle immédiate pour le surplus // débouté Mme [T] de sa demande de condamnation de M. [N] à des dommages et intérêts // débouté Mme [T] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile // condamné Mme [T] à payer à M. [N] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile // condamné Mme [T] aux entiers dépens // rappelé que la décision est exécutoire de droit,


Statuant à nouveau (sic),


débouter Mme [T] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

condamner Mme [T] à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de son préjudice moral,

condamner Mme [T] à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner Mme [T] aux entiers dépens de l'instance.




Il fait valoir :


qu'en vertu du jugement rendu le 2 juillet 2021, qui a été signifié le 16 juillet 2021 et n'a fait l'objet d'aucun recours dans le délai légal, il dispose d'une créance certaine, liquide et exigible ;

que Mme [T] ayant refusé d'exécuter la décision rendue, il n'a eu d'autre choix que de mandater un huissier ;

que Mme [T], qui s'est délibérément abstenue de répondre à sa proposition d'échéancier, est malvenue à lui reprocher d'avoir mandaté un officier public et ministériel pour obtenir les sommes dues ;

que Mme [T], pour soutenir que l'huissier aurait commis une erreur dans son décompte, se contente de dresser une liste des paiements qu'aurait effectués son frère, sans étayer en rien ses affirmations ;

qu'au vu du relevé de compte actualisé qu'il a sollicité de son huissier, il apparaît que tous les actes effectués par celui-ci étaient justifiés, et qu'aucune somme n'a été saisie ou payée indûment ;

que le comportement de Mme [T], qui multiplie les plaintes et les procédures à son encontre, est abusif et dilatoire, raison pour laquelle elle doit être sanctionnée et condamnée à lui régler des dommages et intérêts à hauteur de 2 500 euros au titre du préjudice moral subi.




A l'issue de l'audience, l'affaire a été mise en délibéré au 25 avril 2024.




MOTIFS DE LA DÉCISION 



Sur l'étendue de la saisine de la cour



A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion, et qu'elle ne répond aux moyens que pour autant qu'ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.









A cet égard, il sera précisé que si Mme [T], dans le corps de ses écritures, fait valoir la nullité et demande la mainlevée 'des saisies litigieuses suivantes :


le 28 octobre 2021 la dénonciation de saisie-attribution, ayant donné lieu à la saisie du compte bancaire de 7,18 euros,

le 23 février 2022 le procès-verbal de saisie-vente pour 8 902,98 euros,

le 28 février 2022 menaces de saisie de 4 897,34 euros le 8 mars 2022 à Pôle emploi,

le 3 mars 2022 la dénonciation de saisie-attribution de 9 146,76 euros,

la saisie du compte bancaire le 24 février 2022 de 0 euro,

la saisie du compte bancaire CIC IDF le 22 mars 2022 de 157,30 euros dans la dénonciation de saisie-attribution le 24 mars 2022",


d'une part, elle ne demande à la cour, dans le dispositif de ses écritures, que l'annulation et la mainlevée de saisies-attribution, et d'aucune autre mesure d'exécution forcée, et d'autre part, elle ne sollicite pas l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il déclare recevables les contestations des saisies attributions diligentées les 24 février 2022 et 22 mars 2022, après avoir retenu, dans ses motifs, qu'elle n'était pas recevable à contester une saisie attribution intervenue le 21 octobre 2021, faute d'avoir respecté le délai d'un mois prévu par l'article R.211-11 du code des procédures civiles d'exécution pour ce faire, ni ne fait valoir aucun moyen à l'appui de la recevabilité de la contestation de cette première saisie-attribution.



La saisine de la cour est donc circonscrite à :


la saisie attribution pratiquée le 24 février 2022,

la saisie attribution pratiquée le 24 mars 2022.




Sur les demandes d'annulation et de mainlevée



En vertu de l'article L.111-2 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution.



M. [N] dispose d'un titre exécutoire au sens des articles L.111-3 du code des procédures civiles d'exécution, constitué par le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de Dijon, le 2 juillet 2021.



Ce jugement, assorti de l'exécution provisoire, a été dûment signifié à Mme [T], en personne, le 16 juillet 2021, et dès lors, puisque les conditions prévues par l'article 503 du code de procédure civile sont réunies, il peut être exécuté à son encontre, même si Mme [T] en a interjeté appel et/ou a sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire, et Mme [T] n'est donc pas fondée à reprocher à l'huissier instrumentaire d'avoir poursuivi l'exécution forcée alors qu'elle l'avait avisé qu'elle sollicitait l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal paritaire des baux ruraux, aucune décision en ce sens n'étant au demeurant produite.



Dès lors que ce jugement consacre une créance de M. [N] à l'encontre de Mme [T] et de M. [T], et qu'est en cause une mesure d'exécution forcée, le juge de l'exécution, qui selon les prescriptions de l'article R.121-1 du code des procédures civiles d'exécution, n'a pas le droit de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, n'a pas à statuer sur l'existence d'une créance fondée en son principe. Ainsi, il suffisait au premier juge de constater qu'une condamnation avait été prononcée au bénéfice de M. [N] pour en déduire qu'il justifiait d'une créance, plutôt que de retenir que le principe de la créance de 6 500 euros fondée sur la décision du tribunal paritaire des baux ruraux de Dijon n'était pas contesté.



Pour le même motif tiré de l'article R.121-1 du code des procédures civiles d'exécution, c'est inutilement que Mme [T] critique devant la présente cour, qui statue avec les mêmes pouvoirs que le juge de l'exécution, et qui n'est pas la juridiction d'appel du tribunal paritaire des baux ruraux de Dijon, la décision rendue par ce dernier.



Pour statuer sur la validité d'une mesure de saisie attribution, dont il convient de rappeler qu'elle n'est pas nulle pour le seul motif qu'elle aurait été pratiquée pour un montant erroné, supérieur à celui de la dette, il convient de se placer à la date de la mesure elle-même.









Etant précisé que, comme l'a à raison rappelé le juge de l'exécution, c'est à Mme [T] qu'il appartient de rapporter la preuve que des paiements seraient venus soit réduire soit éteindre la créance dont le recouvrement est poursuivi, de sorte qu'elle n'est effectivement pas fondée à faire sommation au créancier de rapporter cette preuve en ses lieu et place.



La saisie attribution du 24 février 2022 a été effectuée pour avoir paiement d'une créance de 9 146,76 euros en principal et frais.



Mme [T] ne critique pas utilement le décompte de la dette qui figure dans le procès-verbal de saisie, et notamment celui des frais, qui comporte le détail de chacun de ceux qui sont imputés par le créancier.



Elle n'apporte pas de preuve de ce que, à cette date, M. [T], son frère, avait procédé à des paiements ' d'au moins 6 450 euros' comme elle le dit, qui auraient dû venir en déduction de la dette, et aucune reconnaissance par le créancier de ce que des paiements auraient été effectivement réalisés, et du montant de ceux-ci, ne résulte de l'examen des différents actes de poursuite ou décomptes établis par l'huissier mandaté par le créancier. Dans un décompte établi le 28 février 2022, l'huissier reconnaît avoir reçu 4 000 euros de versements directs, mais c'est à Mme [T] de faire la démonstration que ce paiement était antérieur à la saisie du 24 février 2022, ce qu'elle s'abstient de faire.



La seule critique utile qui est formulée par Mme [T] tient au fait que, effectivement, la somme de 7,18 euros qu'elle dit avoir été saisie le 21 octobre 2021, lors d'une précédente mesure de saisie-attribution, et qui est mentionnée par le tiers saisi dans sa déclaration du 24 février 2022,aurait dû être déduite du montant de la créance dont le recouvrement était poursuivi.



Cependant, un paiement de 7,18 euros n'étant pas susceptible d'éteindre une dette de 9 146,76 euros, ce constat est sans incidence sur la validité de la saisie elle-même, puisqu'il existait bien une créance lorsque la saisie a été pratiquée.



La saisie attribution du 22 mars 2022 a été effectuée pour avoir paiement d'une créance de 5 296,61 euros en principal et frais, après déduction d'une somme de 4 000 euros, au titre d'un versement antérieur, étant rappelé que la saisie du 24 février 2022 a été infructueuse.



Là encore, Mme [T] ni ne critique utilement le décompte détaillé de la dette, ni ne rapporte la preuve de paiements antérieurs à la saisie d'un montant supérieur à ceux déjà pris en compte, cette preuve ne pouvant résulter de sa seule affirmation de ce que, à cette date, son frère avait réglé 'au moins 6 600 euros', même avec l'indication du montant et de la date de chacun des prétendus versements effectués par M. [T], dès lors qu'il n'en est pas justifié. Et l'existence de versements supérieurs à 4 000 euros à la date de la saisie en cause ne résulte pas non plus de la lecture des décomptes établis par l'huissier, qui sont postérieurs à cette saisie, puisque l'un, qui retient 7 950 euros d'acomptes, est du 12 décembre 2022, et que l'autre, qui retient 8 969,17 euros d'acomptes, est du 27 mars 2023.



De la même manière, la seule critique utile concerne l'absence de déduction, par l'huissier, du montant de 7,18 euros appréhendé le 21 octobre 2021, mais elle est sans incidence sur la validité de la saisie, puisque la créance en cause était d'un montant de 5 296,61 euros.



Ni les 157,30 euros qui ont été appréhendés lors de la saisie elle-même, ni les versements, ultérieurs, qui figurent sur les décomptes des12 décembre 2022 et 27 mars 2023 n'ont à être imputés sur le montant de la créance pour le recouvrement de laquelle la saisie a été opérée.



Le premier juge, en considérant, pour cantonner à la somme de 846,28 euros les deux saisies attribution pratiquées le 24 février 2022 et le 22 mars 2022, qu'il convenait de se fonder sur le solde de la dette restant dû au 12 décembre 2022 ( soit 1 003,58 euros) et d'en déduire la somme de 157,30 euros appréhendée lors de la saisie du 22 mars 2022, s'est déterminé par des motifs erronés.













Dès lors que Mme [T] ne prouve pas que, à la date de chacune des saisies en cause, la créance de M. [N] était éteinte, ou à tout le moins inférieure au montant de 846,28 euros auxquelles a cantonnées la décision du premier juge, dont la confirmation est sollicitée par l'intimé, la demande d'annulation de ces deux saisies-attribution ne peut prospérer devant la cour.



Par ailleurs, si le juge de l'exécution peut donner mainlevée de toute mesure inutile ou abusive, Mme [T] ne fait pas la démonstration que ces deux mesures étaient abusives, ni qu'elles étaient inutiles, alors que, au vu des éléments soumis à l'appréciation de la cour, la dette n'était pas réglée lorsqu'elles ont été mises en oeuvre.



Dans ces conditions, sa demande de mainlevée mérite également d'être rejetée.



Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [T]



Les saisies en cause n'étant ni inutiles ni abusives, et un créancier étant en droit de recourir à l'exécution forcée pour avoir paiement de sa dette, Mme [T] ne peut se plaindre de devoir supporter les frais bancaires et d'huissier afférents à ces mesures.



Elle ne rapporte pas la preuve que M. [N] ou l'huissier poursuivant se livreraient à un harcèlement à son encontre, à l'origine d'une atteinte infondée à sa tranquillité, et d'une atteinte à son honneur.



Enfin, le juge de l'exécution n'a pas compétence pour porter une appréciation sur le comportement procédural des parties dans le cadre du litige qui a donné lieu aux condamnations qui font l'objet de l'exécution forcée.



En l'absence de preuve d'un comportement fautif du créancier ou de son mandataire, comme de la réalité du préjudice moral allégué, la demande de dommages et intérêts de Mme [T] ne peut prospérer, et le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il l'en a déboutée.



Sur la demande de dommages et intérêts de M. [N]



M. [N] sollicite des dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral subi du fait des plaintes déposées à son encontre par Mme [T], visant notamment des plaintes déposées le 10 mars 2022, le 1er mars 2023 et le 3 mars 2023, à la suite desquelles il a fait l'objet d'une convocation au commissariat qui l'a dit-il profondément marqué et choqué.



L'octroi de dommages et intérêts pour un tel motif n'entre cependant pas dans les pouvoirs du juge de l'exécution, qui ne peut allouer des dommages et intérêts qu'à raison de la mise en oeuvre de mesures d'exécution forcée, ou de la résistance abusive d'un débiteur à l'exécution d'une décision de justice.



La demande, qui en cause d'appel repose sur ce seul motif, rappel étant fait que M. [N] n'a pas sollicité l'infirmation du jugement du juge de l'exécution en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, est donc rejetée.



Sur les dépens et les frais irrépétibles



Partie perdante, Mme [T] doit supporter les dépens de première instance et d'appel.



Quand bien même elle dispose de l'aide juridictionnelle, ce qui lui permet d'assurer sa propre défense en justice, il serait inéquitable que M. [N] doive supporter l'intégralité des frais non compris dans les dépens résultant de l'appel mal fondé dont elle est à l'origine. Dès lors, Mme [T] sera condamnée à régler à M. [N] une somme supplémentaire de 2 000 euros, par application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'appel, et déboutée de sa propre demande au titre des frais irrépétibles.















PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,



Statuant dans les limites de sa saisine ;



CONFIRME le jugement rendu le 2 juin 2023 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles ;



Y ajoutant,



Rejette la demande de dommages et intérêts de M. [N] au titre de son préjudice moral ;



Déboute Mme [T] de toutes ses demandes supplémentaires en cause d'appel ;



Condamne Mme [T] aux dépens, et à régler à M. [N] la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel.



Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le greffier, Le président,

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