25 avril 2024
Cour d'appel de Versailles
RG n° 22/01288

Chambre sociale 4-2

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 22/01288 -

N° Portalis DBV3-V-B7G-VEUZ



AFFAIRE :



[F] [N] épouse [A]



C/



Association UNAPEI 92



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mars 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : F 20/01582















Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Nicolas CHENEVOY



M. [U] [C]







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



Madame [F] [N] épouse [A]

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentant : M. [W] [R] [C] (Délégué syndical ouvrier)



APPELANTE



****************



Association UNAPEI 92

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentant : Me Nicolas CHENEVOY de l'AARPI FIDERE AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J045



INTIMEE



****************



Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,



Greffier lors des débats : Madame Domitille GOSSELIN,








Rappel des faits constants



L'association Unapei 92 est une association départementale à but non lucratif affiliée à l'Unapei, dont l'activité est d''uvrer en faveur des droits des personnes souffrant de handicap mental et de leurs familles pour favoriser leur intégration sociale. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.



Mme [N] épouse [A], née le 26 janvier 1962 a été engagée par l'association, selon contrat de travail à durée indéterminée du 3 septembre 2012 à effet au 1er septembre 2012, en qualité de monitrice éducatrice.



Après une mise à pied conservatoire à compter du 11 octobre 2019 et un entretien préalable qui s'est tenu le 24 octobre 2019, Mme [A] s'est vu notifier son licenciement pour faute grave, par lettre datée du 13 novembre 2019, dans les termes suivants :

« Mme,

Par lettre remise en main propre contre reçu daté et signé par vos soins, en date du 11 octobre 2019, nous vous avons notifié une mise à pied à titre conservatoire prenant effet le même jour à 9h30 et convoqué pour un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement avec Mme [D] [Z], directrice de I'IME section Honoré de Balzac et section [G] [H], fixé le jeudi 24 octobre 2019 à 12 heures 30, au bureau de la directrice de ITME Fermand [H] situé au [Adresse 2].

Vous vous êtes présentée à cet entretien préalable, assistée de M. [M] [Y], membre élu en qualité de titulaire de la délégation du personnel au Comité Social et Économique du Pôle Jeunesse et Inclusion et délégué syndical. Vous étiez reçue par Mme [D] [Z], directrice de I'IME [G] [H], assistée de M. [B] [X], chef de service à l'IME pour la section [G] [H].

Suite à l'entretien qui s'est tenu le 24 octobre 2019 et après avoir recueilli vos explications, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave au motif suivant :

Le 10 octobre 2019, ont été portés à notre connaissance les faits suivants caractérisés comme acte de violence envers l'une des enfants en situation de handicap ([P] [I] une fille âgée de 8 ans) accueillie au sein de notre établissement I'IME section [G] [H].

Précisément, deux de vos collègues, témoins oculaires des faits qui vous sont reprochés, confirmés par les attestations de témoignages circonstanciées et concordantes nous ont fait part des faits suivants :

Le lundi 7 octobre 2019 à 14h30, l'infirmière et la psychologue de l'établissement sont venues chercher trois enfants du groupe 1, pour une prise en charge psychothérapeutique. Elles ont toqué à la porte puis sont entrées dans la salle éducative du groupe 1 où vous vous trouviez avec le groupe d'enfants. Elles vous ont vue debout, tenant avec vos deux mains un couvercle métallique et frapper un coup fort avec ce couvercle sur la tête d'une enfant ([P] [I]), qui elle était assise.

Vous avez spontanément justifié votre geste auprès de vos deux collègues par un jeu avec l'enfant. Or, vos collègues déclarent que ce sont à la fois la nature et la force du geste qui leur ont donné un ressenti très différent, et pour cette raison, elles l'ont signalé conjointement à leur hiérarchie.

Lors de l'entretien préalable, vous avez reconnu les faits en expliquant qu'il s'agissait d'un jeu anodin, un jeu de bruitage et que votre gestuelle aurait été mal interprétée par vos deux collègues. Mme [D] [Z] vous a précisé que vos deux collègues sont affirmatives sur la nature et la force du geste qui donnent une autre vision de l'incident. Mme [D] [Z] vous a également rappelé que frapper un enfant à la tête avec un couvercle métallique n'est en aucun cas, un acte éducatif.

En votre qualité d'éducatrice spécialisée, vous êtes amenée à accompagner au quotidien les enfants accueillis à I'IME de la section [G] [H], personnes mineures vulnérables en situation de handicap et plus particulièrement les plus jeunes de l'établissement âgés entre 6 et 10 ans.

Les faits relatés dans les deux attestations de témoignages relèvent d'un acte de violence physique et morale caractéristique de maltraitance et constituent un manquement grave à vos obligations contractuelles et professionnelles. En votre qualité d'éducatrice spécialisée vous avez notamment, l'obligation de ne pas commettre d'actes maltraitants à l'égard des personnes accueillies au sein de nos établissements, qu'ils soient intentionnels ou non intentionnels, qui ont ou pourraient avoir pour conséquence de porter atteinte à la santé et sécurité des enfants accueillis, personnes mineures vulnérables en situation de handicap.

Votre attitude est d'autant plus préjudiciable que notre association a pour mission d'accueillir des personnes en situation de handicap, des personnes vulnérables et dépendantes de la prise en charge et de l'accompagnement par notre personnel et que de par vos fonctions, vous êtes chargée de l'accompagnement de ces personnes dans leur vie quotidienne. Par votre comportement, vous avez porté gravement atteinte aux conditions d'accueil, d'accompagnement, de prise en charge et d'évolution positive de la jeune enfant concernée dont vous deviez assurer l'accompagnement.

Ce comportement fautif et réfléchi, dépourvu de toute spontanéité ainsi que le préjudice que notre association subit du fait de vos agissements, aussi bien à l'égard de cet enfant et ses parents, qu'à l'égard de notre autorité de tarification et de tutelle (Agence Régionale de Santé) sont très graves.

Force est de constater qu'il résulte des faits qui vous sont imputés que votre comportement constitue une violation de vos obligations résultant de votre contrat de travail et des relations de travail (article L. 1222-1 du code du travail « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi'»). Or, ces obligations s'imposent au salarié même pendant la période de suspension de son contrat de travail.

Dès lors vos agissements ont rompu la confiance que nous avons eue à votre égard.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour motif disciplinaire, en application des dispositions prévues à l'article 33 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

Nous considérons que les faits susmentionnés constituent une faute grave rendant impossible votre maintien dans l'association même pendant la période de congé-préavis.

Par conséquent, compte tenu de la nature des faits qui vous sont reprochés et notamment de votre comportement violent à l'encontre d'un enfant en situation de handicap, l'importance de la faute constatée et de sa gravité sont telles qu'elles rendent impossible votre maintien dans l'association pendant la durée du préavis.

Vos agissements étant constitutifs de faute grave, votre licenciement sans préavis ni indemnité de rupture prend effet ce jour, à la date de l'envoi de la présente lettre recommandée avec demande d'avis de réception, notifiant la rupture.

Vous faites actuellement l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire. En raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés consécutifs à votre licenciement pour faute grave le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mise à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé. ».



Mme [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre en contestation de son licenciement, par requête reçue au greffe le 1er septembre 2020.



La décision contestée



Devant le conseil de prud'hommes, Mme [A] a présenté les demandes suivantes :

- indemnité de licenciement conventionnelle : 9 391,59 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 4 485,54 euros,

- indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 448,55 euros,

- dommages-intérêts pour harcèlement moral : 4 485,54 euros,

- indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : 17 942,16 euros,

- rappel de salaire sur la période allant du 11 octobre 2019 au 14 novembre 2019 : 2'583,47'euros,

- congés payés sur rappel de salaire : 258,34 euros,

- article 700 du code de procédure civile : 500 euros,

- ordonner à l'association Unapei 92 de remettre à Mme [A] les bulletins de paie, le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi conformes à la décision du conseil et ce, sous astreinte de 10 euros par jour et par document,

- dire que les sommes allouées à Mme [A] porteront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de céans,

- ordonner l'exécution provisoire,

- condamner l'association Unapei 92 aux entiers dépens.



L'association Unapei 92 a quant à elle conclu au débouté de la salariée et a sollicité la condamnation de celle-ci à lui verser une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



L'audience de conciliation a eu lieu le 5 novembre 2020.



L'audience de jugement a eu lieu le 13 décembre 2021.



Par jugement contradictoire rendu le 11 mars 2022, la section activités diverses du conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- débouté Mme [A] et l'a condamnée aux dépens,

- débouté l'association Unapei 92 de sa demande reconventionnelle au titre des frais irrépétibles.



La procédure d'appel



Mme [A] a interjeté appel du jugement par déclaration du 21 avril 2022 enregistrée sous le numéro de procédure 22/01288.



Par ordonnance rendue le 28 février 2024, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries le 28 mars 2024.



Prétentions de Mme [A], appelante



Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 19 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [A] demande à la cour d'appel de':

- dire et juger que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamner l'association Unapei 92 à lui verser les sommes suivantes :

. 9 391,59 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

. 4 485,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 448,55 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

. 17 942,16 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 2 583,47 euros à titre de rappel de salaire sur la période allant du 11 octobre 2019 au 14 novembre 2019,

. 258,34 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- dire et juger qu'elle a été victime de harcèlement moral,

en conséquence,

- condamner l'association Unapei 92 à lui verser la somme de 4 485,54 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

- ordonner à l'association Unapei 92 de lui remettre les bulletins de paie, le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi conformes à la décision de la cour et ce, sous astreinte de 10 euros par jour et par document,

- dire que les sommes qui lui seront allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes de Nanterre,

- condamner l'association Unapei 92 à lui verser la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'association Unapei 92 aux entiers dépens.



Prétentions de l'association Unapei 92, intimée



Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 14 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, l'association Unapei 92 demande à la cour d'appel de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté l'association Unapei 92 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

en conséquence,

- constater que le licenciement de Mme [A] repose sur une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée au sein de l'association pendant son préavis,

- constater que les conditions de travail de Mme [A] ne sont pas constitutives de harcèlement moral,

- débouter Mme [A] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner Mme [A] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.




MOTIFS DE L'ARRÊT



Il résulte des articles 396, 397 et 405 du code de procédure civile que le désistement est parfait si la non-acceptation du défendeur ou de l'intimé ne se fonde pas sur un motif légitime, qu'en outre, le désistement tout comme l'acceptation peut être exprès ou implicite.



Selon l'article 401 dudit code, le désistement d'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente.



En l'espèce, Mme [A], appelante, s'est désistée de son appel sans réserves par conclusions de désistement régularisées le 25 mars 2024 et l'association Unapei 92 a accepté ce désistement par conclusions reçues au greffe le même jour.



Il convient en conséquence de déclarer le désistement d'appel parfait et par conséquent, en application de l'article 384 du code de procédure civile, de constater l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la présente juridiction.



En vertu de l'article 399 du code de procédure civile, le désistement d'appel emporte sauf convention contraire soumission de l'appelant de payer les frais de l'instance éteinte.



Les dépens d'appel seront donc à la charge de Mme [A] sauf convention contraire.



PAR CES MOTIFS



La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,



DONNE acte à Mme [F] [A] de son désistement d'appel et à l'association Unapei 92 de son acceptation,



DIT que le désistement d'appel est parfait,



CONSTATE en conséquence l'extinction de l'instance et déclare la cour dessaisie,



DIT que, sauf convention contraire, les dépens d'appel seront à la charge de Mme [A].



Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Le greffier, Le président,

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